Le troisième jour

selon les écritures

Le credo chrétien contient des inexactitudes. Mais de toutes, c’est bien celle-là qui pose le plus de problème. Cet article est de circonstance car nous sommes le samedi saint (sans majuscule de mon point de vue). Ainsi demain sera célébré le troisième jour selon les écritures. Pessa’h a muté en Pâques, et de la tombée de la nuit du 14ème jour du premier mois du calendrier, il est devenu le dimanche proche de la pleine lune qui suit le printemps. Mais le calendrier n’est qu’un détail en comparaison en rapport avec le thème du jour qui est célébré chaque année, un peu comme une sorte d’anniversaire.

Avant de revenir aux évangiles, penchons-nous sur une sourate injustement méconnue. Dans la mesure où elle se situe en toute fin du Coran, quasi tous les musulmans la connaissent par coeur afin d’apporter un peu de diversité dans leur récitation quotidienne. J’avoue humblement ne pas la connaitre par coeur. Et jusqu’à aujourd’hui, je n’aurais eu qu’à baisser les yeux si le sujet de cette sourate était venu sur la table. Aujourd’hui, nous allons comprendre  sa portée. Plusieurs mots posent problèmes. Posons d’abord le texte selon la traduction habituelle.

1. N’as-tu pas vu comment ton Seigneur a agi envers les gens de l’éléphant .
2. N’a-t-Il pas rendu leur ruse complètement vaine?
3. et envoyé sur eux des oiseaux par volées
4. qui leur lançaient des pierres d’argile?
5. Et Il les a rendus semblables à une paille mâchée.

Selon les explications usuelles, le récit est celui d’un conte arabe de l’époque du Prophète, paix sur lui. Un récit guerrier de conquête où un homme lance une armée contre la Mecque avec un éléphant. Son projet échoue par la main de Dieu. Un petit conte contextuel qui ne mange pas de pain. Nous sommes à la fin du Coran, le récit comporte un éléphant. Et voilà. Pourtant, cela n’empêche pas les savants de se triturer le cerveau. Un premier mot pose problème: ababil traduit par « par volées ». Ensuite, certains se sont posés des questions à propos du mot sijjil. On a donc expliqué que l’armée a été détruite par des pierres d’argile comme projectiles. Enfin, nous pouvons aussi nous questionner sur le mot ʿaṣfin, traduit par paille. La tradition s’est contenté d’une description d’un état pitoyable visuellement. Tout parait cohérent. Sauf que ababil ne ressemble à rien de connu. Dans le lexique coranique, le mot est rattaché à la racine ABL qui désigne les chameaux. Mais il est impossible de passer de cette racine à ababil en doublant le b. Rien ne justifie cette modification. Quant à la racine ABBL, elle n’existe pas plus à moins de la créer à partir du Coran, ce qui est un raisonnement circulaire. Le sens donné est donc déduit du contexte. Contexte qui est fourni par un conte arabe.

J’ai déjà évoqué la sourate al fil dans un de mes articles sans toutefois l’étudier. Voir Les oiseaux et les pierres d’argile:  https://www.stephanpain.com/2023/01/27/eucharistie/ Comme on peut le remarquer d’ailleurs, le nom original de l’article était eucharistie. Je n’ai pas pris la peine de renommer l’adresse de l’article, car je souhaitais conserver la trace de ce nom original. En effet, le sujet principal de cet article était l’eucharistie. La sourate al fil ne venait qu’illustrer une piste d’analyse liée à la préfiguration par le récit de Joseph, paix sur lui. https://www.stephanpain.com/prefiguration-par-joseph/ Méthode d’analyse messianique  régulièrement utilisée ici. Dans cet article, la sourate me servait à illustrer un combat métaphysique constant de la Révélation: le combat contre les partisans de l’éléphant. Cette théologie provient initialement de Genèse 15, où Dieu enseigne à Abraham, paix sur lui, sur sa descendance et les menaces qui pèsent sur elle. https://www.stephanpain.com/2023/01/05/le-roi-et-les-oiseaux/ Elle est composée d’animaux de la terre partisans du schisme, et d’oiseaux, qui ont l’esprit tourné vers le ciel. Dans le Coran, un autre enseignement délivré à Abraham, paix sur lui, est rapporté à propos du temps de la résurrection: les oiseaux divisés se rejoignent à la fin. Nous comprenons que l’éléphant, le plus gros animal terrestre est une métaphore des gens du Livre les plus radicaux sur la question de la possession de la terre. Nous n’apprendrons pas à un éléphant à voler. A part des terres, si vous me pardonnez ce jeu de mot de circonstances.

Je ne vais pas retranscrire tout le processus qui m’a mené à comprendre.  Ababil n’est pas issu d’une racine arabe, il s’agit d’un assemblage d’avantage issu de la tradition biblique. Il ne faut pas chercher très loin: Ab Babil. Ab signifie père, mais il peut aussi désigner un groupe de patriarches. Et nous avons bien des patriarches en lien avec des oiseaux: les Patriarches, paix sur eux. Comme nous l’avons vu dans d’autres articles, Abraham, paix sur lui, ne vient pas de la ville d’Ur, mais de Babylone. C’est là où il fait face au roi de la région et où il est jeté dans le feu (feu se dit our en hébreu). Nos Patriarches viennent donc de Babil, ainsi qu’elle est nommé dans le Coran et dans la Bible. Par deux fois, Dieu utilise la métaphore des oiseaux pour parler des croyants à Abraham, paix sur lui. L’expression tayran Ababil, Ab-Babil, Oiseaux Patriarches de Babil, convient donc parfaitement à Abraham et à Lot, paix sur eux.
Poursuivons. Le verbe tarmīhim est un singulier. Celui qui fait l’action ici, ce n’est pas les oiseaux mais Dieu lui-même. C’est lui qui envoie les pierres. En réalité, tarmīhim et arsala sont des actions complémentaires. Dieu envoie ses oiseaux et Il lance des accusations contre ses ennemis par l’intermédiaire de ceux-ci. Les oiseaux et les pierres sont une seule et même entité. Les pierres sont d’argile, comme l’être humain. Les pierres vivantes porteurs de la Parole sont un thème typiquement évangélique au contraire des oiseaux qui est un thème patriarcal. Mais la sourate correspond à une temporalité mecquoise. En effet, l’introduction de la sourate est « alam tara », qui est un rappel d’une contemporanéité. Le Prophète, paix sur lui, a été témoin des agissements des gens de l’éléphant. Il a mené le combat contre eux, comme nous l’avons vu dans l’article précédent (Bobo.Bo). Nous en déduisons que le dernier verset le concerne directement. Selon ma compréhension, il s’agirait d’avantage de papier mâché, ce qui décrirait métaphoriquement l’état des contes et légendes de l’éléphant après le passage du Coran dans les esprits. Nous avons donc une séquence qui décrit trois étapes de la Révélation et la constance de la lutte contre les gens de l’éléphant au travers des millénaires.  Voici une traduction:

1. N’as-tu pas vu comment ton Seigneur a agi envers les gens de l’éléphant .
2. N’a-t-Il pas rendu leur ruse complètement vaine?
3. et envoyé sur eux des Oiseaux Patriarches-de-Babylone
4. qui leur lançaient des Pierres (investies de l’Esprit) d’argile?
5. Et Il a rendus (leurs contes grâce au Coran) semblables à du papier mâché.

Les gens de l’éléphant étaient basés à $odome. Les Patriarches sont venus leur annoncer leur destruction prochaine. Ensuite, ils sont revenus au même endroit. La ville à pris le nom de la capitale de Juda que nous connaissons bien. Ils ont été accusés par les disciples du Messie après qu’ils s’y soient installés depuis leur Galilée natale. Enfin, dans le Coran, il est rapporté à divers endroits que les caravanes empruntent des routes qui mènent à cette ville, et que les arabes peuvent constater ce qu’il est advenu de la ville ancienne de par l’étendu des ruines que personne ne peut cacher et ce, jusqu’à nos jours, ainsi que leurs descendants sont toujours présents, prêts à reprendre possession de la ville. Ils ont d’ailleurs à faire à eux à Yathrib, car ils sont leur principaux opposants par leur fausse tradition scripturaire.
Est-ce à dire que tous les habitants de la ville sont des injustes et qu’y vivre condamne? Non.

11.82. Et, lorsque vint Notre ordre, Nous avons fait de ses hauteurs ses tréfonds, et fîmes pleuvoir sur elle en masse, des pierres d’argile alignées, 83 portant une marque connue de ton Seigneur. Et elles (ces pierres) ne sont pas loin des injustes.

manḍūdin peut se traduire par « alignées ». Comme je le suggérais déjà il y a quelques années, le terme pierre pourrait avoir plusieurs sens ici. Des pierres qui portent une marque connue pourraient être les pierres tombales des croyants alignées qui recouvrent la cité ancienne. Ou bien les croyants eux-mêmes marqués par le sceau de la prophétie dans une version purement spirituelle. La pluie décrite ici est un long processus au contraire de la destruction nocturne initiale décrite dans Genèse. Ce décret qui autorise les croyants à habiter une ville maudite et détruite est rapporté par la sourate al balad, 90.

90.1. Je ne  jure pas par cette cité!
2. et toi, tu es autorisé dans cette cité

Ce décret est émis au Messie, puisqu’il est exerce son ministère  dans la cité, mais également au Prophète, paix sur lui, puisque de part son métier initial, il a été amené à s’y rendre.

Mais revenons au titre de cet article. Pour illustrer l’eucharistie comme point de départ de la communauté des Pierres vivantes, j’avais copié une grande partie du chapitre 40 de Genèse, mis en parallèle avec son équivalent coranique de la sourate 12. Les oiseaux mangeaient dans la tête du crucifié dans les deux textes. La métaphore était trop évidente et trop belle. En relisant l’article alors que je travaillais sur l’analyse de la sourate al fil, une phrase m’a sauté aux yeux. Je ne comprends pas comment je n’ai pas vu cela plutôt. Le mot « trois » revient 9 fois dans les 14 versets cités. Et pourtant, je suis passé à coté. C’est ainsi.
La dernière mention du mot trois introduit la conclusion du passage qui annonce la période des deux derniers millénaires. Je ne vais pas vous faire l’offense de l’expliquer. Il me semble que c’est assez explicite, cela commence un peu comme un credo:

Gn 40.20 Le troisième jour, jour de la naissance de Pharaon,
il fit un festin à tous ses serviteurs; et il éleva la tête du chef des échansons et la tête du chef des panetiers, au milieu de ses serviteurs: 40.21 il rétablit le chef des échansons dans sa charge d’échanson, pour qu’il mît la coupe dans la main de Pharaon; 40.22 mais il fit pendre le chef des panetiers, selon l’explication que Joseph leur avait donnée. 40.23 Le chef des échansons ne pensa plus à Joseph. Il l’oublia.

Le chef des échansons est clairement dans le collimateur. Nous, nous ne l’avons pas oublié.

Paix.