Le nom de cet article indique qu’il va traiter du Signe de Jonas. Or, un article portant un nom similaire est déjà présent sur ce site. Il est la copie exacte de celui qui a été rédigé en 2014 sur le réseau social bleu. Son titre était en réalité: « Julius et le Signe de Jonas ». Peu satisfait du résultat global j’ai préféré le mettre en privé. Plutôt que de réécrire intégralement, je vais en reprendre la majeure partie en guise d’introduction avec quelques corrections, avant de mener une étude théologique plus pertinente sur les évangiles.
Le 4 septembre 2014
Lorsque l’on aborde le Livre totalement, c’est à dire en lisant chacune des trois parties, on est frappé par la différence de traitement de l’histoire des prophètes. C’est un phénomène qui tend à amplifier le sentiment qu’a chaque groupe d’être dans la Vérité. Dans chaque partie, il règne une atmosphère. Si bien que peu importe si l’on se perd dans la confrontation des dogmes et des rites ou l’interprétation des textes. L’atmosphère, c’est avant tout un ressenti, c’est comprendre Dieu en « faisant sa psychothérapie » selon nos capacités humaines. J’utilise volontairement le mot psychothérapie, tant pour moi, la religion en tant que voie vers Dieu se révèle jour après jour comme relevant exclusivement de ce domaine. Si l’homme a été fait à l’image de Dieu, si l’on ôte tous les attributs qui nous sont inaccessibles, alors il nous reste comme une empreinte fossile de son âme profonde.
Tour à tour, vengeur, colérique, implacable puis ensuite miséricordieux, plein d’amour et de compassion pour enfin laisser éclater sa majesté et sa justice. Mais Dieu, c’est aussi tout cela à la fois. Une entité tout à la fois immensément transcendante et incroyablement proche de nous. En réalité, Dieu ne peut être compris qu’au travers de Sa création. La beauté du monde, la puissance émotionnelle des histoires qu’Il a imaginé dans leur réalité et non comme elles sont écrites, peuvent nous le faire entrevoir. Si je fais une distinction entre la réalité et l’écrit, c’est que les histoires telles qu’elles sont vécues, sont d’une telle complexité, font appel à tant de détails qui prendraient des heures et des heures à raconter, que les résumer dans des récits condensés est une effroyable entreprise. La psyché humaine, à l’image de celle de Dieu, est si riche et tourmentée. De l’extérieur, c’est incompréhensible. Que dire lorsque ces histoires traversent les siècles?
Dans la vision d’un musulman, la lecture de la tradition rabbinique est insupportable, tant parfois les situations sont crues et révèlent les prophètes sous des jours sombres. Sa conclusion sera invariablement que la Torah, les livres qui composent le canon biblique, ont été profondément réécrits, et que les enseignements qui en découlent sont entachés de ces modifications. Effectivement, si il est admis aisément que la Torah a subi des altérations, elle demeure globalement à peu près comme elle a été rédigée. On peut changer des mots, mais on ne peut pas changer une atmosphère. Elle tranche avec la poésie du Coran. Les prophètes sont avant tout des hommes, avec leurs terribles défauts.
Pourquoi ces défauts sont-ils totalement gommés dans le Coran? La question reste en suspend.
Mais l’absence de preuves n’est pas la preuve de l’absence.
De tout cela, nous avons hérité du dogme de l’infaillibilité prophétique dans l’Islam et d’une opposition franche avec le judaïsme rabbinique. Les musulmans ont tôt fait de traiter les juifs de pervers pour leur présentation des prophètes. Parce que la miséricorde humaine est limitée ainsi que notre capacité d’analyse psychologique, Dieu a donc volontairement restreint les données dans le Coran. Mais pour qui sait lire entre les lignes, parfois on peut entrevoir les faiblesses de chacun. Je pense qu’il s’agit d’un travail personnel. Chacun pourra comprendre en fonction de sa capacité à absorber la vérité. Pour savoir la Vérité, il suffit de demander. Mais il ne ne faut pas avoir peur de la réponse. La vérité crue fait parfois excessivement mal. Tandis que le mensonge ronge. Je ne vais donc pas m’aventurer dans ce qui ne me regarde pas.
Pour comprendre le présent, il faut s’appuyer sur le passé. Et pour dévoiler le passé, il suffit d’avouer le présent.
Le dogme principal du christianisme est la résurrection. Sans résurrection, il n’y a tout simplement pas de christianisme. C’est aussi simple que ça. Nous savons que la résurrection est un mythe. La résurrection, c’est un peu comme des points de l’histoire de la seconde guerre mondiale. On ne se questionne pas de savoir si elle est possible théologiquement et si elle obéit aux prophéties. Elle a eu lieu. Point.
En réalité, la résurrection au bout de trois jours est la seule explication retenue pour le Signe de Jonas. Jonas étant « mort » pendant trois jours dans le ventre de la baleine, alors le messie devait faire de même. Seulement voilà, l’histoire prophétique de Jonas ne se résume pas à l’épisode de la baleine. D’ailleurs, pour illustrer le concept de retour à la vie, d’autres prophètes auraient tout aussi bien pu faire l’affaire et être cité de la même manière. Je me suis longtemps demandé ce que pouvait être le Signe de Jonas. Et puis j’ai trouvé. Comme une évidence. En réalité, ce qui fait la spécificité de Jonas, par rapport à la majorité des autres prophètes de l’histoire de la Révélation, est que celui-ci s’est tout d’abord dérobé (physiquement) à la mission que Dieu lui donnait. C’est d’ailleurs la raison de sa présence sur ce bateau. Jonas pensait s’éloigner de Dieu en prenant la mer. Cela peut prêter à sourire à notre époque, mais dans la vision tribale qu’avait les hébreux d’un Dieu qui règne sur un territoire donné, c’est tout à fait concevable. Parce qu’il ne pouvait pas se soustraire à son destin, alors il fut jeté à l’eau puis sauvé par une baleine. Ainsi Dieu montre qu’Il parvient toujours à ses fins et que malgré tout son libre-arbitre, l’homme, lorsqu’une mission particulière lui est destinée, doit l’accomplir. Il n’a pas le choix.
La version de Mathieu apparait déformée par une mauvaise interprétation théologique que l’auteur a cru bon ajouter pour parfaire la compréhension (ou bien il s’agit d’un ajout ultérieur: voir sources).
Mt 12.40 Car, de même que Jonas fut trois jours et trois nuits dans le ventre d’un grand poisson, de même le Fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre.
C’est donc dans Luc, que l’on retrouve ces mêmes paroles sans l’ajout précédent:
Luc 11.29 Comme le peuple s’amassait en foule, il se mit à dire: Cette génération est une génération méchante; elle demande un miracle; il ne lui sera donné d’autre miracle que celui de Jonas.
30 Car, de même que Jonas fut un signe pour les Ninivites, de même le Fils de l’homme en sera un pour cette génération.
Le reste du passage de Mt est quasi identique. Il est absent de Marc. Ainsi, nous pourrions suggérer que le signe en lien avec Jonas serait un signe adressé à tout le monde et non réservé aux disciples seuls telle que la résurrection nous ait décrite à la fin des 4 évangiles. Cependant, il y a une redondance dans Mt qui ne contient pas la mention:
Mt 16.4 Une génération méchante et adultère demande un miracle; il ne lui sera donné d’autre miracle que celui de Jonas. Puis il les quitta, et s’en alla.
Ainsi, nous pouvons établir un lien solide entre l’expression « génération qui demande un miracle » et Signe de Jonas. Cela va nous être utile par la suite.
Voici l’hypothèse que je proposais en guise de conclusion:
Ce n’est donc pas une renaissance au bout de trois jours que Jésus prophétisait, mais il signifiait à ses détracteurs qui remettaient en cause sa légitimité en tant que prophète à cause de son comportement, qu’il n’avait pas eu le choix, et qu’il aurait préféré refuser sa mission et continuer sa vie. La perspective de servir de guide lui paraissait totalement saugrenue et en opposition radicale avec sa façon de voir la vie. Il n’aspirait pas le moins du monde à supporter le poids de la sainteté. D’ailleurs, jusqu’au dernier instant avant sa capture par les romains, dans le jardin de Gethsémané, il remet en question son issue fatale (épisode de la coupe qui ne doit pas s’éloigner).
Bien évidemment, c’est aussi parce qu’il avait cette personnalité atypique et contestataire au destin chaotique, que cette mission apocalyptique lui convenait parfaitement. Dans les Évangiles, il y a un énorme trou entre 12 et 30 ans. Croyez-vous qu’il n’y ait rien à raconter? Croyez-vous que les gens ont perdu la mémoire ou que les textes se sont perdus? Bien sur que non. Ce trou correspond à une vie qui ne cadre pas du tout avec les Évangiles. Ceux qui ont côtoyé Jésus à cette époque là, et qui ont assemblé le grand puzzle de sa vie, étaient en mesure de comprendre et de percevoir les desseins de Dieu au travers. Ils se sont accordés pour choisir le silence. Ils ont compris que la doctrine était plus importante que le support physique de celle-ci. Ce qui n’a pas été le cas de tous ceux qui ont suivi, à commencer par Paul, qui rapidement, s’est coupé de toute une partie de l’histoire, idéalisé le personnage et amorcé le processus de sa déification. Est-il parti en Inde? A-t-il mené une vie dissolue? Ou bien était-ce tout simplement un simple anonyme? Ce que l’on doit retenir, c’est que Dieu l’a lavé de tous ses péchés dans le Coran.
Octobre 2024
Rappelons au passage que Jonas signifie colombe et que c’est sous cette forme qu’apparait l’Esprit Saint qui descend sur le Messie. « Le fils d’Amittaï », au sens figuré, peut s’interpréter comme signifiant « un homme de vérité » »3, à partir du mot hébreu émeth signifiant « vérité »4.
A présent, nous allons aborder l’étude d’une manière totalement différente. Bien entendu, cette insatisfaction concernant le Signe de Jonas et son lien avec le dogme de la résurrection physique du Messie auprès de ses disciples était restée. Si j’avais abordé la question sous des angles différents, il n’en demeure pas moins que nous étions au coeur du sujet. Le christianisme est centré autour de la Pâque. Cette Pâque célèbre une résurrection, et celle-ci serait justifiée par le Signe de Jonas.
Tout d’abord, le verset Mt 12.40 cité au-dessus. Il est question de trois jours et trois nuits. Trois jours et trois nuits entre le vendredi soir et le dimanche matin. Le fait est qu’il n’y a qu’une journée et deux nuits. Soit à peu près la moitié du compte. Même en bricolant sur les heures, la tâche s’avère impossible. La seule solution est d’évoquer une durée générique.
L’histoire de Jonas, paix sur lui, se déroule essentiellement dans un bateau. Nous allons donc regrouper tous les récits évangéliques qui ont lieu dans un bateau mais uniquement avec le Messie dedans. Nous allons aussi omettre les passages qui décrive une montée ou une descente, sauf une seule. Si je précise cela, c’est parce que des apôtres/disciples sont des pêcheurs de Galilée. Kapharnaum est un port de pêche.
Mt 13.1 Ce même jour, Jésus sortit de la maison, et s’assit au bord de la mer. 13.2 Une grande foule s’étant assemblée auprès de lui, il monta dans une barque, et il s’assit. Toute la foule se tenait sur le rivage. 13.3 Il leur parla en paraboles sur beaucoup de choses, et il dit:
Mc 3.9 Il chargea ses disciples de tenir toujours à sa disposition une petite barque, afin de ne pas être pressé par la foule. 3.10 Car, comme il guérissait beaucoup de gens, tous ceux qui avaient des maladies se jetaient sur lui pour le toucher.
Lc 5.3 Il monta dans l’une de ces barques, qui était à Simon, et il le pria de s’éloigner un peu de terre. Puis il s’assit, et de la barque il enseignait la foule.
Voilà mon interprétation. Dans Luc a été ajouté l’épisode de la pêche miraculeuse. Les premiers apôtres sont des pêcheurs mais le Messie n’est pas monté à bord des bateaux avant leur conversion. Il tenait à s’assurer de ne pas être trahi par ces hommes si tout ne se passait pas comme il faut. Une fois les hommes faits disciples et dignes de confiance, il a donc accès à bord et peut voyager d’un bord à l’autre du lac. Confronté à la foule qui souhaite écouter celui qui se présente comme prophète, le Messie se dit qu’il a tout intérêt à prêcher depuis le lac (par deux fois dans Mc). Car si quelques uns en venaient à être hostiles à son discours novateur et voudraient s’en prendre physiquement à lui, il n’aurait qu’à s’éloigner du rivage. Il n’est pas trop sur de lui et prend ses précautions malgré la volonté inébranlable qu’il a de faire entendre sa prédication. On peut discerner une sorte de dissonance. Poursuivons.
Mc 6.45 Aussitôt après, il obligea ses disciples à monter dans la barque et à passer avant lui de l’autre côté, vers Bethsaïda, pendant que lui-même renverrait la foule. 6.46 Quand il l’eut renvoyée, il s’en alla sur la montagne, pour prier. 6.47 Le soir étant venu, la barque était au milieu de la mer, et Jésus était seul à terre. 6.48 Il vit qu’ils avaient beaucoup de peine à ramer; car le vent leur était contraire. A la quatrième veille de la nuit environ, il alla vers eux, marchant sur la mer, et il voulait les dépasser. 6.49 Quand ils le virent marcher sur la mer, ils crurent que c’étaient un fantôme, et ils poussèrent des cris; 6.50 car ils le voyaient tous, et ils étaient troublés. Aussitôt Jésus leur parla, et leur dit: Rassurez-vous, c’est moi, n’ayez pas peur! 6.51 Puis il monta vers eux dans la barque, et le vent cessa. Ils furent en eux-même tout stupéfaits et remplis d’étonnement;
Le début de Mt 14.22-33 est similaire puis:
14.28 Pierre lui répondit: Seigneur, si c’est toi, ordonne que j’aille vers toi sur les eaux. 14.29 Et il dit: Viens! Pierre sortit de la barque, et marcha sur les eaux, pour aller vers Jésus. 14.30 Mais, voyant que le vent était fort, il eut peur; et, comme il commençait à enfoncer, il s’écria: Seigneur, sauve-moi! 14.31 Aussitôt Jésus étendit la main, le saisit, et lui dit: Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté? 14.32 Et ils montèrent dans la barque, et le vent cessa. 14.33 Ceux qui étaient dans la barque vinrent se prosterner devant Jésus, et dirent: Tu es véritablement le Fils de Dieu.
Mc 4.35 Ce même jour, sur le soir, Jésus leur dit: Passons à l’autre bord. 4.36 Après avoir renvoyé la foule, ils l’emmenèrent dans la barque où il se trouvait; il y avait aussi d’autres barques avec lui. 4.37 Il s’éleva un grand tourbillon, et les flots se jetaient dans la barque, au point qu’elle se remplissait déjà. 4.38 Et lui, il dormait à la poupe sur le coussin. Ils le réveillèrent, et lui dirent: Maître, ne t’inquiètes-tu pas de ce que nous périssons? 4.39 S’étant réveillé, il menaça le vent, et dit à la mer: Silence! tais-toi! Et le vent cessa, et il y eut un grand calme. 4.40 Puis il leur dit: Pourquoi avez-vous ainsi peur? Comment n’avez-vous point de foi? 4.41 Ils furent saisis d’une grande frayeur, et ils se dirent les uns aux autres: Quel est donc celui-ci, à qui obéissent même le vent et la mer?
Lc 8.22 Un jour, Jésus monta dans une barque avec ses disciples. Il leur dit: Passons de l’autre côté du lac. Et ils partirent. 8.23 Pendant qu’ils naviguaient, Jésus s’endormit. Un tourbillon fondit sur le lac, la barque se remplissait d’eau, et ils étaient en péril. 8.24 Ils s’approchèrent et le réveillèrent, en disant: Maître, maître, nous périssons! S’étant réveillé, il menaça le vent et les flots, qui s’apaisèrent, et le calme revint.8.25 Puis il leur dit: Où est votre foi? Saisis de frayeur et d’étonnement, ils se dirent les uns aux autres: Quel est donc celui-ci, qui commande même au vent et à l’eau, et à qui ils obéissent?
Mc 8.10 Aussitôt il monta dans la barque avec ses disciples, et se rendit dans la contrée de Dalmanutha. 8.11 Les pharisiens survinrent, se mirent à discuter avec Jésus, et, pour l’éprouver, lui demandèrent un signe venant du ciel. 8.12 Jésus, soupirant profondément en son esprit, dit: Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe? Je vous le dis en vérité, il ne sera point donné de signe à cette génération. 8.13 Puis il les quitta, et remonta dans la barque, pour passer sur l’autre bord.
Avant de fournir une explication, revenons sur l’histoire de Jonas, paix sur lui. Dans sa jeunesse, il aurait transmis une prophétie au roi Jéhu selon une interprétation rabbinique. Ce dernier est mort en -814. Nous pouvons donc évaluer la date de naissance du prophète à environ -834. Il a vécu sous le règne de Jeroboam(-782 à -753). En -745 il aurait donc eu 90 ans. Cet âge avancé pourrait être l’explication simple de son refus et de sa fuite: il se sentait tout simplement trop vieux. Tout le récit se déroulerait donc vers -745. 40 ans plus tard, soit vers -705, au moment de la prise de pouvoir après une régence avec son père par le roi assyrien (s)ennachérib, celui-ci décide de faire de Ninive la capitale du royaume. La ville sera alors agrandie et embellie. 40 ans plus tard, la ville, et surtout ses habitants, voient s’accomplir la bénédiction. Le prophète, quant à lui, s’est surement couché avec ses pères peu de temps après sa mission. Il n’a donc pu assister à cet accomplissement.
Qu 37.147 et l’envoyâmes ensuite (comme prophète) vers cent mille hommes ou plus.
148 Ils crurent, et nous leur donnâmes jouissance de la vie pour un temps.
Concernant le Messie, un faisceau d’indices, principalement le jour de Pessah qui se déplace dans la semaine, tendent à prouver que la Passion a lieu en +30. Quant à la date de destruction du Temple, il y a beaucoup moins de doute puisqu’elle est en +70. Nous avons bel et bien un écart de 40 ans entre les deux dates. Tout ceci pour montrer que si le Signe de Jonas est à prendre en compte, il faut aussi ne pas perdre de vue que concernant la deuxième partie (mort/malédiction|vie/bénédiction) il y a une inversion entre les prophètes et les villes. Nous comprenons alors que la mort du Messie est une partie du récit qui correspond à la deuxième partie du récit de Jonas, paix sur lui. Nous reviendrons plus tard sur ce point.
Première partie, chapitres I et II, introduite par:
1.1 La parole de l’Éternel fut adressée à Jonas, fils d’Amittaï, en ces termes:
2 « Lève-toi! Va à Ninive, la grande ville, et prophétise contre elle; car leur iniquité est arrivée jusqu’à moi. »
Deuxième partie, chapitres III et IV, introduite par:
3.1 La parole de l’Éternel fut adressée une seconde fois à Jonas, en ces termes:
2 « Lève-toi, va à Ninive la grande ville, et fais-y la publication que je te dicterai. »
Revenons donc à cette première partie: la fuite, le bateau et le poisson. Quel est l’objectif final du ministère du Messie? La ville considérée comme sainte et capitale de Juda. Que fait le Messie? Il parcourt la Galilée en tout sens et surtout il se rend en territoire païen. Il y a ce fameux épisode des porcs de Gérasa, qui s’avère être un échec total.
Mt 8.34 Alors toute la ville sortit à la rencontre de Jésus; et, dès qu’ils le virent, ils le supplièrent de quitter leur territoire.
Pour se rendre en territoire païen, il faut utiliser une barque. En réalité, lorsque le Messie accompagné de ses disciples prend une barque pour traverser le lac, il est en train de fuir l’ordre divin de se rendre dans la grande ville. Mais à ce moment là, lui seul le sait. Les apôtres étaient prêts à tout après les différents miracles. Ils ne questionnaient pas la destination. Prêcher durant cette période était certes positif, mais sans la Passion l’homme n’aurait été qu’un prédicateur itinérant comme les autres. Reconnaissons que certains enseignements ne nécessitent pas la venue particulière d’un prophète majeur. Si nous enlevons toute la partie du ministère entre la passation depuis Jean le Baptiste, paix sur lui, et l’arrivée dans les faubourgs de la grande cité (énumération des paraboles clefs et exécration), rien n’est fondamentalement altéré de la Révélation. Tout cela est dispensable. Je dis cela spécifiquement pour les chrétiens qui ignorent les enseignements de l’école d’Hillel basés sur la Miséricorde, qui au passage est une école pharisienne, dans lesquels sont ancrés un grand nombre de croyants de cette époque et qui sont bien plus réceptifs à l’annonce d’un changement radical. Ils s’opposent en cela aux enseignements de l’école de Shammai, bien plus littéraliste. L’enseignement chrétien moderne principal basé sur l’amour de l’autre n’est en aucun cas une nouveauté du ministère messianique. Quelques recherches sur le sujet vous le confirmeront.
La réponse par le Signe de Jonas n’est pas déconnectée de son contexte. Elle se situe en réalité en Mt 8.12. Pour une raison inconnue, elle a disparu du texte, mais nous en discernons encore une trace par l’expression qui lui est accolée comme nous l’avons vu au début de cet article. Si le Messie évoque le Signe de Jonas, c’est tout simplement parce qu’il vient juste d’avoir lieu. En effet, cette réponse en 8.12 est donnée à la descente de la barque. Les trois éléments dissociés appartiennent au même récit. Si ils sont dispersés et inversés ainsi c’est parce que deux éléments ont été ajoutés et viennent perturber la compréhension: il s’agit de la marche sur l’eau et de la commande sur les éléments. Si on enlève ces deux miracles, tout devient plus cohérent. Au passage, avis personnel, je ne suis pas vraiment favorable à ce type de miracle très démonstratif et inutile sinon à conférer à une personne un statut divin qu’elle ne possède pas. Si je dis cela c’est parce que les miracles de guérison/exorcismes changent la vie d’une personne. Pour le comprendre il faut faire attention à un tout petit détail du texte: « A la quatrième veille de la nuit environ, il alla vers eux ». A la première rédaction, ignorant du concept de veille, il me semblait que cette phrase signifiait que s’achevait une période de trois jours et trois nuits à la veille de la quatrième nuit. La période aurait débutée par la nuit (c’est d’ailleurs ce que dit Mc 4.35). Mais il s’agit d’une période beaucoup plus courte. Les juifs avaient divisé la nuit en trois comme le font les musulmans (Dieu vient dans le dernier tiers de la nuit). Ce sont les romains qui ont imposé cette façon de diviser la nuit en 4. Il s’agit certainement d’une division du temps liée aux temps de garde pour les militaires et n’a pas de connotation religieuse. Alors si nous perdons la stricte équivalence en nombre d’heure, nous conservons tout de même l’idée de trois unités temporelles. Mais ce qui est perdu d’un coté est gagné de l’autre. Car le mot grec employé pour « veille » est phylakin (φυλακὴν). Ce mot est employé dans les évangiles de nombreuses fois sous le sens de « prison ». La prison décrit la situation de Jonas, paix sur lui, dans son poisson. En voici une traduction corrigée:
Jo 2.3 et il dit: « Dans ma détresse j’ai invoqué l’Éternel, il m’a répondu : du sein (estomac) du Shéol j’ai été sauvé, tu as entendu ma voix.
Le Messie est resté trois veilles « éloigné » de ses apôtres.
Dans la mesure où la tempête n’a pas cessé, ces trois veilles à douter ont pu sembler une éternité.
En théologie chrétienne, il est affirmé que le Messie descendit pendant trois jours au Shéol (le séjour des morts en attendant le jour de la Résurrection). Ceci afin de faire coïncider la Passion avec le poisson. Or, que dit l’évangile, dans l’échange avec l’un des deux crucifiés:
23.43 Jésus lui répondit: Je te le dis en vérité, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.
Il n’est pas possible de traduire le texte grec autrement. Ce qui signifie qu’avant la tombée de la nuit, l’un et l’autre seront morts et connaitront une ascension et non une descente.
4.158 mais Allah l’a élevé vers Lui. Et Allah est Puissant et Sage.
Deux options s’offrent à nous: soit ce verset est un ajout, soit l’interprétation du séjour au Shéol après la Passion est fausse. Pour trancher, appuyons-nous sur la suite.
Recomposons le récit:
Mc 4.34 Il ne leur parlait point sans parabole; mais, en particulier, il expliquait tout à ses disciples. 4.35 Ce même jour, sur le soir, Jésus leur dit: Passons à l’autre bord. 4.36 Après avoir renvoyé la foule, ils l’emmenèrent dans la barque où il se trouvait; il y avait aussi d’autres barques avec lui. 4.37 Il s’éleva un grand tourbillon, et les flots se jetaient dans la barque, au point qu’elle se remplissait déjà. 4.38 Et lui, il dormait à la poupe sur le coussin.
Trois veilles s’écoulent au milieu de la tempête.
Mc 6.48 A la quatrième veille de la nuit environ, il alla vers eux, (…)
4.39 et le vent cessa. Ils furent en eux-même tout stupéfaits et remplis d’étonnement;Mc 4.40 Puis il leur dit: Pourquoi avez-vous ainsi peur? Comment n’avez-vous point de foi?
Après l’épisode des porcs de Gérasa, ils reviennent en Galilée.
Mc 8.11 Les pharisiens survinrent, se mirent à discuter avec Jésus, et, pour l’éprouver, lui demandèrent un signe venant du ciel. 8.12 Jésus, soupirant profondément en son esprit, dit: Pourquoi cette génération demande-t-elle un signe? Je vous le dis en vérité, il ne sera point donné de signe à cette génération.
Luc 11.29 il ne lui sera donné d’autre miracle que celui de Jonas.
30 Car, de même que Jonas fut un signe pour les Ninivites, de même le Fils de l’homme en sera un pour cette génération.
Le Signe de Jonas est là! Que s’est-il passé? Le Messie trouve ses apôtres et commence à prêcher en Galilée. Il est baptisé par Jean, paix sur lui. Ce dernier est mis à mort par le pouvoir. Le Messie réalise alors le concret de la prédication novatrice. Dieu lui annonce son départ pour la grande cité. Il en déduit qu’il a peu de chance de s’en sortir vivant et décide de naviguer à l’opposé, en territoire païen. Une tempête éclate alors qu’il est en train de dormir au fond du bateau. Il est impossible de continuer à dormir dans un bateau secoué de la sorte, mais pourtant il ne bouge pas. Il est tétanisé. Connaissant parfaitement les écritures, le récit de Jonas, paix sur lui, tourne dans sa tête depuis un bon moment. En montant dans une barque sur un lac, il était loin de s’imaginer qu’il pourrait se retrouver dans la même situation. C’est la panique. Il sait que ses apôtres ne vont pas le jeter à l’eau. Ils ne font pas le lien entre Jonas et lui, parce que tout simplement ils ne sont pas dans sa tête. Il est le seul à établir la connexion. Si il ne fait rien, la tempête ne va pas s’arrêter. Mais quoi faire? Étendre les bras vers les flots ne peut suffire. C’est le Créateur qui commande et Lui seul décide de la fin. Se jette-t-il à l’eau pour suivre les traces de Jonas? Tombe-t-il à la mer par mégarde? Se morfond-il pétrifié au fond du bateau en faisant semblant de dormir pendant des heures? Si il se retrouve à l’eau, il pourrait avoir été avalé aussi par un poisson. Le fait que son âme tente de se séparer de son corps se retrouve dans le texte puisqu’une fois regroupé et non retouché, il semble être à la fois entrain de dormir dans le bateau et sur une montagne proche avec une vue sur ses disciples entrain de méditer. Dans tous les cas de figure, c’est bel et bien à l’instar de Jonas, paix sur lui, qu’il accepte de retourner en paix avec le Créateur et d’accepter sa mission en son coeur. A ce moment là, la tempête s’arrête. Le Messie se retrouve debout parmi ses compagnons et regarde l’étendu d’eau devant lui. Il est serein.
Dans sa situation, il n’a pas peur d’assumer son manque de foi au grand jour et lorsqu’on lui demande, à sa descente du bateau, un Signe, il explique qu’après ce qu’il vient de se passer, c’est à dire que ses apôtres ont pu témoigner de la Colère divine à son encontre, la suite des événements, c’est à dire la descente vers la cité avec sa conséquence funeste, va montrer à tous que si la tempête a cessé, c’est parce qu’il a changé de direction et accepté son destin en son coeur. Seulement voilà, les apôtres, si ils ne l’auraient jamais jeté par dessus bord, n’auraient certainement pas révélé non plus sa défaillance. Car eux aussi connaissaient les écritures et ont fini par comprendre au moment de cette réponse donnée au débarquement. Ils ont choisi de se taire et n’ont jamais reparlé de cet épisode. Ils avaient encore moins de raison de le faire lorsque les événements se sont enchainés. Longtemps après, ils ont décidés d’un commun accord, d’inventer cette histoire de marcher sur les eaux. Il s’agissait d’une métaphore pour illustrer le fait de ne pas se jeter à l’eau! Supposons que cette expression imagée existait déjà à cette époque dans cette culture. Si ce n’est pas le cas vraiment, ce sera notre compromis poétique avec la réalité.
Le dogme de l’infaillibilité prophétique ne peut donc subsister. Je rappelle que ce dogme est la porte ouverte vers toutes les dérives. Car de prétendre que celui qu’on suit, qu’il soit vivant ou mort, est infaillible, revient à s’affirmer soi-même comme infaillible. Une voie royale vers l’autoritarisme. Le phénomène est amplifié avec le temps, car les paroles initialement rapportées avec un biais interprétatifs se voient altérées puis augmentées par des récits inventés. Ce qui explique les deux beaux cancers en phase terminale que sont le christianisme et l’Islam modernes.
37.139 Yunus (Jonas) était certes, du nombre des Messagers.
142 Le poisson l’avala alors qu’il était blâmable.
21.84 Et mentionne (Jonas), quand il partit, irrité. Il pensa que Nous n’allions pas l’éprouver. Puis il fit, dans les ténèbres, l’appel que voici: « Pas de divinité à part Toi ! Pureté à Toi ! J’ai été vraiment du nombre des injustes. »
Tout comme Jonas, paix sur lui (je vous laisse placer les éléments du récit en face):
Jonas descend vers Tarse (balle perdue à l’apôtre des gentils)
Il descend dans le bateau
Il descend dans l’eau
Il descend dans le poisson trois jours et trois nuits (le Shéol dans le texte biblique)
Le Messie descend vers la ville des Gadaréniens
Il descend dans le bateau
Il descend dans l’eau de ses larmes
Il descend dans l’abîme de la mécréance pendant trois veilles (équivalent au Shéol)
- Jonas accepte, se rend à Ninive, la future capitale des ennemis de l’extérieur.
Il prophétise. La ville se repent. Il vit.
Bénédiction 40 ans plus tard. - Acceptant son destin en son coeur, il se rend dans la ville des ennemis intérieurs des croyants, la capitale de Juda.
Il meurt sur la croix après avoir prononcé la sentence de malédiction sur la ville.
Il est enterré. Son corps est ôté par les romains puis brulé. Pas de résurrection physique.
40 ans plus tard cette malédiction s’accomplit.
Tout porte à croire que l’arbre qui pousse proche de Jonas, paix sur lui, dans la nuit et meurt aussi vite, est à lier à la croix messianique qui est dressée pour quelques heures dans une opposition mort/vie ainsi que protection/tourment.
37.146 Et Nous fîmes pousser au-dessus de lui un plant de courge,
Il est dit qu’il s’agit d’une courge. Yaqtin en arabe, Qiqayon en hébreu est généralement traduit par citrouille, qui est le légume mis à l’honneur par la fête de la fin d’octobre.
Paix sur les Justes,
paix sur tous les prophètes et paix sur Jonas.
Sources
A propos du verset 12.40, l’auteur de cette étude dit: « Nombre d’exégètes modernes pensent que cette interprétation du signe de Jonas aurait été ajoutée après coup, et que la sentence énigmatique de Jésus viserait à la prédication de la repentance. »
https://www.persee.fr/doc/ether_0014-2239_1948_num_23_4_2020
Les porcs:
https://www.stephanpain.com/2020/02/16/le-possede-de-gadara/