Dernières modifications le 20 décembre 2018·18 minutes de lecture
Le mouvement des Gilets jaunes est enraciné dans la France périphérique. Les samedis à Paris tournent vite à la confrontation. Il est donc impossible pour un parisien de vivre l’expérience de l’immense majorité des acteurs de cette révolution. Après avoir visionné plusieurs reportages immersifs, mon choix s’était porté sur un rond-point en particulier. Il me semblait y régner une franche et authentique camaraderie. Bien sur, je ne pouvais être guère plus qu’une pièce rapportée trimbalant comme un boulet mon parisianisme, mais en adoptant une attitude effacée, j’espérais quelques bribes d’humanité en ces temps difficiles. La qualité et le soin apporté au documentaire aurait du me mettre la puce à l’oreille. Vous comprendrez bientôt pourquoi.
Au bout d’une semaine d’hésitation, je me mis donc en route en ce mardi après-midi. Une dernière prière dans une grande mosquée de banlieue éloignée, et je plonge dans l’obscurité de la campagne et ses routes secondaires. Ma ville de destination n’est sur aucun axe majeur, n’a pas d’attractivité touristique particulière, n’a pas de pôle économique déterminant. C’est une ville d’un peu plus de 10 000 habitants. Lorsque j’arrive au rond-point, le seul occupé à plusieurs dizaines de kilomètres à la ronde, c’est pour constater qu’il est loin du centre-ville et que l’activité économique se résume à un vendeur automobile et un marchand de fruits et légumes. Le centre commercial est de l’autre coté de la ville. Aucun enjeu réel donc.
Je me gare puis avise un groupe d’hommes au milieu des voies. Une palette achève de se consumer. La chaleur est agréable. Le contact est un peu sec. A vrai dire, rien d’étonnant. Au bout d’un mois, tous les gilets se connaissent par leurs prénoms. Ma présence peut paraître incongrue et elle l’est. Bien sur, je n’ai pas cherché à mentir et explique brièvement ma démarche. Au bout de quelques minutes, deux hommes s’en vont. Je reste avec un seul. Il m’explique que lui aussi n’est pas de la ville mais d’un peu plus loin vers Paris et qu’il ne connait donc pas les gens du rond-point. Nous discutons démocratie. Une dame d’un certain age vient se joindre à nous. Très gentille, elle tient des propos parfois un peu décousus. Du moins j’ai la curieuse impression qu’elle essaie maladroitement de me faire passer un message. Et voilà qu’entre en scène Julie. Julie est une jeune femme d’une trentaine d’années. Elle est jolie, possède un fort tempérament et n’a pas sa langue dans sa poche. Elle est très curieuse quant à mon avis sur la question démocratique. Un peu trop inquisitrice à mon égard pour ne pas éveiller mes soupçons. Elle me déclare avoir rejoint le mouvement alors qu’elle participait à la collecte de la Banque alimentaire dans le 8ème arrondissement durant l’acte II. Ce dont elle avait été témoin l’avait persuadé de la légitimité des manifestants. Je suis agréablement surpris et lui partage que je connais bien la Banque alimentaire pour avoir participé à plusieurs collectes. Quel extraordinaire coïncidence! Que de point communs nous avons! Et cette manière qu’elle a de me regarder. Je suis sous le charme. Mais, car il y a un mais, je suis curieux. Je lui demande dans quel magasin elle était ce jour-là. Elle tente d’esquiver la question, mais j’insiste. Non pas pour la coincer, dans ma tête ce n’est pas du tout une question piège, mais juste pour essayer de comprendre et situer le scénario. Elle me répond alors évasivement: “J’ai fait 4 magasins un peu partout dans le 8ème.” A vouloir trop en faire, elle vient de se trahir. Ce n’est tout simplement pas possible de faire 4 magasins pour la Banque alimentaire. J’ai encore le réflexe de m’étonner et d’argumenter, puis fais mine de ne pas insister sur le sujet. Ensuite, l’homme prend congé. Elle aussi. Me voilà seul avec la dame. J’ai faim et il est presque 20 heures. Je n’ai pas d’autre solution que d’aller en ville. La dame, ne voulant pas rester seule, décide de partir aussi. Le rond-point est alors vide.
Kebab. Recherche d’un endroit pour la nuit. Je viens me garer sur le plus grand parking de la ville. Pas de bruit. Idéal. L’endroit est désert. Juste quelques personnes qui vont et viennent pour reprendre leur véhicule. A mon réveil, vers les 7 heures du matin, je constate qu’il y a un semi-remorque arrêté vers l’entrée de la place. Un vigile se tient à quelques mètres. Tout en me préparant pour la prière, j’observe le vigile et son gilet jaune se diriger dans ma direction. Mon camion est un peu isolé dans ce grand parking. Je réalise qu’il tourne autour de moi sans trop s’approcher. Je décèle une certaine fébrilité. Qu’importe. J’effectue ma prière puis je sors faire un tour. Vers 8h30, je me mets en route vers le rond-point. Cette fois, je me gare sur le parking du marchand de fruits et légumes. C’est un grand parking d’environ une centaine de mètres de long où il n’y a résolument aucun problème de saturation. Je suis content de constater qu’il y a beaucoup plus d’activité que la veille. Tout le monde est sur le pied de guerre, d’autant plus que la nouvelle est tombée: les forces de l’ordre vont intervenir pour dégager la zone suivant les ordres du ministère. L’heure d’intervention n’est pas connue. A vrai dire, il n’y a pas grand chose à sauver. Deux baraques ont été aménagées avec des poutres de récupération et des bâches de chantier. Des bidons pour faire du feu et des barrières en plastique pour créer un obstacle sur la chaussée. Le balais des blocages est bien rodée et chacun oeuvre à sa manière. Un homme aux cheveux gris, d’air distingué, arrive. Il vient me parler et se désole du peu de volonté démocratique du groupe. D’autres ronds-point voisins sont plus volontaires. Ici, on se contente de bloquer sans autre perspective. Encore une fois, j’aurais du prêter plus attention à son discours. Il laisse une pile de tracts fraîchement imprimés et disparaît. Comme je n’ai pas pour ambition de faire quelque chose d’illégal, je profite des embouteillages créés pour distribuer les tracts. Je me suis trouvé une utilité. J’ai tôt fait de constater que je suis quasiment le seul attelé à cette tâche. Qu’importe. Pendant plusieurs heures, j’ai donc pu saluer tous les automobilistes de la région. Parfois une discussion s’engageait. Qui sur le temps de blocage, qui sur la politique, qui sur le futur du mouvement. J’ai donc pu savoir par moi-même, le pourcentage de gens supportant le mouvement. Etant sur un rond-point et vêtu d’un gilet jaune, il n’y avait aucune ambiguïté sur la nature du tract. Je considère donc que tous ceux qui le prenaient, était, à des degrés divers, supporters. Ceux qui y étaient hostiles, passaient à coté de moi, souvent en accélérant. Il est clair qu’il faut faire attention. Ce n’est pas un jeu. J’évalue ceux qui étaient hostiles à environ 1 voitures sur 10. Je ne compte pas tous les messages d’encouragement et les mercis.
Une fois, la pile terminée, je revenais vers la cabane et discutait avec un homme âgé. Sa curiosité et sa gentillesse ne pouvait tromper. Au bout d’un long temps de discussion, il m’avouait sa foi. Je n’étais donc pas surpris. A vrai dire, c’est la seule personne avec qui j’ai pu avoir un réel échange. L’homme est parti et le silence s’est fait autour de nous: les routes avaient été bloqués en amont. Après tout ce brouhaha de lourds camions, de klaxons, ce silence tranchait radicalement. On entendait les oiseaux.
Et puis voilà que mes amis d’un jour s’inquiétaient. Il y avait deux bouteilles d’acide au fond de la cabane. Ils ne souhaitaient pas que les gendarmes tombent dessus. Naïvement, je propose de les ranger dans mon camion. C’est ainsi que je m’éloigne avec deux gros sacs remplis et dont j’ignore le contenu. Que voulez-vous, je ne pense pas à mal.
L’heure de la salat approche alors que les gendarmes font leur apparition. La tension est palpable parmi les gilets. Voilà un mois qu’ils tiennent cet endroit. Des souvenirs. De l’amitié. De l’espoir. Et ceux-là qui viennent tout détruire. Ils ne peuvent pas comprendre tout ça. Nous sommes une douzaine. Ils sont une cinquantaine, dont certains habillés en golgoth avec boucliers. Ils se mettent en rang comme à la parade. C’est assez impressionant. Et c’est voulu. Je comprends que je vais devoir prier dans cette situation. Voilà bien la prière de dohr la plus hallucinante que je n’ai jamais faite! Debout au milieu d’un rond-point avec des rangées de gendarmes face à moi.
Et voilà que Julie rentre en scène. Elle revient de nul part. Elle tient une sorte de banderole faite avec son pare-soleil et où il est inscrit “Nous sommes des citoyens” au feutre dessus. Elle me tourne autour. Pendant ce temps les gradés informent les responsables. Ils promettent une amende de plusieurs milliers d’euros en cas de récidive. Ils brandissent un arrêté sans vraiment le laisser dans les mains des gens. Tout le monde comprend bien qu’il n’y a aucun cadre légal à l’opération, mais aussi qu’il est inutile de se rebeller car c’est la garde à vue assurée. Julie se rapproche de moi et me tend un bout de sa banderole. “Tiens là” me fait-elle. Elle m’entraîne à sa suite et va plaisanter avec les gendarmes attendant les ordres. A observer leurs visages, je vois bien qu’ils sont beaucoup trop détendus. L’un d’eux répond aux remarques amusées. Un autre tapote sur un bidon en rythme et se fait reprendre immédiatement par un de ses collègues. Je lance alors: ” Vous êtes beaucoup plus efficace que nous: voilà une demi-heure qu’il n’y a plus aucune voiture sur ce rond-point.” Les gendarmes ne peuvent cacher leur amusement à mes paroles.
A vrai dire, il n’y a pas grand chose qui puisse changer la situation. Nous allons devoir laisser la place. Julie m’entraîne vers elle en direction du parking. C’est alors que je lance: “Tu sais, je suis venu avec un camion de gendarmes.” (En effet, mon camion est un véhicule de gendarmerie déclassé, dont on peut encore voir l’inscription en filigrane “gendarmerie” sur la portière.) Son attitude change brusquement. Elle parait décontenancée. “Tu es gendarme?” fait-elle. Avec un grand sourire, je cultive l’ambiguïté. Tout ça sous le regard amusé des troupes à trois mètres de moi.
Nous arrivons à mon camion. Elle est garée à coté de moi. Je propose alors de lui rendre les sacs. “Non, non, garde-les. Tu nous les rendras une fois arrivé en ville.” Nous nous mettons en route vers le centre-ville. Rendez-vous est donné dans un bar. Les mines sont déconfites. Tout ça pour ça. Nous sommes bientôt une trentaine. Les propositions fusent sur la poursuite du mouvement. Personne ne désire que cela en reste là. Après quelques bières ingurgitées, nos gaulois réfractaires décident d’occuper les passages piétons de la ville. L’ambiance est bonne enfant. Certains automobilistes se prêtent de bonne grâce au jeu en faisant mine de ne pas bouger afin de contenir les autres. Ceux qui ne sont pas au courant et que je vais informer de la situation en les abordant, marquent systématiquement leur approbation et leur sentiment de rejet face à l’attitude du gouvernement. La population est résolument solidaire. Qu’importe les sondages. Qu’importe les médias. La vérité est là, dans la rue.
Nous avons ôté nos gilets. Nous faisons une centaine de mètres. Nous ne perturbons pas tant que ça et aucun véritable embouteillage n’est à déplorer car en réalité, il n’y a pas beaucoup de trafic dans cette petite ville. Néanmoins des gendarmes à pied font leur apparition. C’est le jeu du chat et de la souris autour d’un petit rond-point (celui en photo). A un moment, je me retrouve seul et désire rejoindre le groupe. Je traverse alors l’un des passages piétons autour du rond-point. Je suis en plein milieu de la rue alors que la voiture qui arrivait se met à accélérer brusquement. Je sursaute dans un réflexe pour parer le choc. La voiture s’immobilise. Je me dirige vers le conducteur qui baisse la vitre. Je constate alors qu’il s’agit de deux gendarmes en tenue dans une voiture banalisée mais à immatriculation militaire. L’homme me dit sur un ton méprisant: “Faites attention quand vous traversez, vous pourriez vous faire écraser.” Je suis tellement abasourdi que je ne trouve rien à dire et m’éloigne de ce que je considère comme une racaille dans l’uniforme d’un serviteur de l’état. Le jeu ne m’amuse plus du tout et prend mes distances d’avec le groupe. Un homme âgé vient alors me parler: “Je ne veux pas me mêler à eux, car certains insultent les gendarmes. Ca va mal finir.” Je répond alors qu’il faut se méfier des agents provocateurs. Ils sont là pour semer la discorde. Les forces de l’ordre ne jouent pas selon les règles. Nous poursuivons la discussion lorsque qu’un homme que je soupçonnais d’être un indic se joint à nous. “Ils m’ont forcé à effacer des vidéos. Je pense que nous ne devrions pas rester là et rentrer chez nous.” Il essaie, visiblement de nous influencer à abandonner. C’est donc un influenceur. “Je suis en sursis.” ajoute-t-il. L’équivalent des trolls qui pullulent sous les articles de Facebook. Ce sont des gens qui sont là pour saper le moral des troupes. Le vieil homme lui raconte mon anecdote de la menace que j’ai subi et lui précise que j’ai gardé une photo du véhicule. L’homme, alors prêt à partir, change subitement d’avis et propose de revenir vers le rond-point. Il initie le mouvement et nous lui emboîtons le pas. Au bout de quelques mètres, il prétexte je ne sais quoi et change de direction tandis que le vieil homme poursuit son chemin. Le commissariat de la ville est à une quinzaine de mètres. Décidément, j’ai du flair et surtout pas mal d’expériences sur le sujet. Me sentant en danger, je décide d’envoyer la photo par mail à plusieurs amis et je raconte mon histoire au téléphone tandis que le groupe s’attable à la terrasse du bar “l’Etoile”, que l’on voit sur la photo. L’homme revient au bout d’un long moment, s’assoie et me fixe d’un oeil noir alors que je suis hilare au téléphone à quelques mètres de là.
Je mets fin à ma conversation et rejoins le groupe. Une dame aux cheveux blonds colorés, d’allure bourgeoise, me parle sans vraiment se tourner vers moi. Elle semble bouillir intérieurement à mon égard. Elle me parle de Julie et de comment je l’ai connue. Décidément. Cette Julie…
Je change de place et me retrouve avec un homme âgé lui aussi, d’un bon niveau social également. La conversation arrive sur la question des agents de renseignements infiltrés. Puis sur les agents provocateurs. Il tient alors ces propos: ”Il y en a marre de ces flash-balls. On devrait nous aussi s’armer et se venger d’eux.” Message reçu. J’ai très bien compris qui est assis à coté de moi. Enfin, je me lève et discute avec un autre homme. Il est passionné de droit. Nous en venons à discuter de l’utilisation des réseaux sociaux pour le profiling psychologique. Il m’informe qu’il existe des algorithmes très puissants pour détecter qui sont les réels leaders d’opinion et leur impact ainsi que leurs actions à venir. Je lui réponds que nous sommes quasiment dans Minority report. C’est assez inquiétant. Puis, nous en venons à parler des agents des RG infiltrés. Il me regarde alors droit dans les yeux, avec un regard pétillant, avec un sourire en coin: “Ils sont nombreux, très nombreux.”
Message reçu. Julie tente une dernière chose. Elle semble beaucoup moins sûre d’elle. Elle me demande si je serai là vendredi pour tracter. “Je n’habite pas ici, je vais rentrer chez moi. Je ne connais pas l’homme aux tracts.” Je suis épuisé. Il est grand temps de rentrer chez moi. La route est un peu longue et fatigante car non éclairée, mais le souvenir de tout ce que je viens de vivre et de tous les détails qui me reviennent un à un, me plongent dans une grande euphorie.
En route vers la joie!
Scénario de politique-fiction:
gestion de crise révolutionnaire par le ministère de l’intérieur
La stratégie employée par l’exécutif doit s’appuyer sur les médias. Cela consiste à multiplier les effets d’annonce. Le moteur initiale de la contestation étant la justice fiscale donc l’argent et le point faible des moyens de défense, c’est à dire les forces de l’ordre, étant l’adhésion aux valeurs portées par le peuple, il conviendra donc d’axer cette stratégie sur ces deux points.
Premier point: laisser courir le bruit que les forces de l’ordre sont dépassées en capacités et que les effectifs n’arrivent pas à récupérer physiquement. On pourrait penser au premier abord que l’exécutif se tire une balle dans le pied en révélant ses propres faiblesses. Il n’en est rien. Les forces de l’ordre ne sont pas du tout dépassées par les événements. Au contraire, elles ont une totale maîtrise de la situation. Cela est du avant tout à un maillage conséquent du renseignement sur tout le territoire. Ainsi, même sur le plus petit rond-point, il y aura toujours quelqu’un qui travaille pour la police. Si ce n’est pas un fonctionnaire, ce sera un simple « indic ». Les indics n’ont aucun pouvoir décisionnel et doivent s’en remettre à un interlocuteur précis. L’avantage des indics est qu’ils sont bien implantés dans la population. Le défaut est la relative lenteur du processus car un officier du renseignement sera à même de gérer de l’intérieur même du mouvement grâce à des codes connus de tous les fonctionnaires du rang. Un drapeau, un tee-shirt, une phrase clef, etc…
Nous en avons eu la preuve certaine puisque le ministère a été sommé de changer de stratégie après l’acte 3. Certainement sous la pression d’intérêts économiques privés. Nous constatons donc que les forces de l’ordre servent donc, dans l’absolu, des intérêts distincts de ceux de la nation. Bien évidemment, une grande majorité des effectifs sont conscients de ce fait. Ce n’est que la peur qui fait tenir la machine debout et aussi les primes, il faut aussi le dire.
Alors donc, pourquoi, si les services de renseignements assurent un contrôle total de la population, le ministère annonce que la police est au bord de la rupture? Ce n’est pas pour galvaniser les Gilets jaunes. Comprenez bien que les policiers parlent entre eux. Si ils ont un droit de réserve vis à vis du public, ce n’est pas le cas en interne. Ils sont comme tous les français, ils parlent politique. Ils parlent de démocratie, de justice fiscal, comme tout un chacun. Il est donc clair que parmi eux, certains vont se montrer réticent à l’idée de cautionner le pouvoir en place. Mais, c’est délicat. Comment oeuvrer en faveur de la contestation alors que leurs propres collègues sont susceptibles de les dénoncer à la hiérarchie. Les sanctions sont rudes. Si la discussion existe, elle se fait de manière très prudente. On ne peut pas faire mieux placé qu’un officier du renseignement pour savoir qu’on peut toujours être surveillé. De quoi sombrer dans la paranoïa. Pour chasser les éventuels traîtres à leur pouvoir, le ministère a donc tendu un piège. Croyant que leurs rangs sont en position de faiblesse, certains pensent que le moment est bon de se découvrir. Le piège se referme alors sur eux. Ce n’est que de bonne guerre, diront certains. Certes.
Mais comment accepter que le pouvoir utilise le mensonge, surtout concernant des gens qui ont dédié leur vie au renseignement donc à la quête de la vérité? Deux conceptions de la vie s’affrontent. La vérité ne peut servir le mensonge. Cette situation n’est pas tenable.
Deuxième point: les primes. Des annonces ont été faites sur le sujet. 300 euros ont été promis. Il est clair que si j’étais à la place du ministère de l’intérieur et avec sa mentalité, ce n’est pas 300 euros que j’enverrais dans une enveloppe à ses exécutants, mais plutôt 2000, voire beaucoup plus. Avec la consigne d’en garder secret le montant. 300 serait le tarif de base. En gros, il s’agirait plutôt d’une prime à volume variable proportionnelle au rendement du fonctionnaire. Rendement qui aura été apprécié à sa juste valeur avec tous les moyens à dispositions, notamment vidéos. Gageons que ceux ayant fait une utilisation immodérée du flash-ball et autres joyeusetés auront une contrepartie à la mesure de leur haine de l’humanité.
Quant à ceux qui auront mis de la mauvaise volonté, en se faisant porter pale par exemple, ou identifiés comme laxistes ou complices de la foule, ils ne verront pas le joli chèque arriver.
Sachez messieurs, vous qui êtes restés fidèles à votre idéal de maintien de l’ordre, et avez compris où était la légitimité du pouvoir, que vous êtes majoritaires au sein de la police. C’est une évidence. Je le lis sur vos visages. Courage. Tout va bien se passer. Chacun vit avec l’espoir de ce qu’il y a au bout.
Paix sur vous.